mardi, septembre 24, 2024

Faut-il être réceptif pour entrer en hypnose ?

Faut-il être "réceptif" pour entrer en hypnose ? Voici une question qui m'est souvent posée... et que je ne me pose jamais. 

Certains de mes clients me consultent en précisant qu'une précédente séance d'hypnose avec un autre praticien s'était soldée par un échec... le thérapeute ayant mentionné leur "manque de réceptivité". Parfois, le consultant, lui-même se qualifie de "non réceptif", parce que son expérience d'un spectacle d'hypnose ne lui a pas permis de se comporter de façon étrange, contrairement à d'autres autour de lui. Je m'étonne alors de l'audace de la personne dépassant la sentence ou le caractère définitif de sa "non réceptivité" pour tenter une nouvelle expérience avec moi. Je lui précise alors immédiatement qu'elle n'a plus à s'inquiéter de sa réceptivité, n'ayant rien à recevoir de moi. 

Au risque de décevoir, on ne reçoit pas l'hypnose.

La présence ou l'absence de réceptivité présuppose l'absence ou la présence de passivité en séance. Au fond, le sujet de la réceptivité est celui de la passivité. Effectivement, si je reçois quelque chose, une solution par exemple, je n'ai pas besoin de créer et deviens spectateur de mon changement. Et si je devais recevoir l'hypnose de mon praticien, alors il me faudrait à tout prix être réceptif. Quelle pression !

Vous l'avez compris, l'expression est inappropriée. On entre en hypnose, on créé son état d'hypnose et jamais, au grand jamais, on ne la reçoit. Je dirais même que la réceptivité est un piège car plus une personne est désignée comme "réceptive" et plus elle pourrait se draper dans sa passivité. Recevoir, accueillir, faire sienne la vérité de l'autre, du thérapeute en l'occurrence. Bien sûr la vérité de l'autre n'est que partielle, incomplète, tronquée et forcément inadaptée à la nôtre. Celle-là même que nous ne connaissons pas et cherchons tout au long de notre existence tant elle évolue.

La réceptivité suppose également une forme de pouvoir de la part du praticien. Une transmission, une magie. De quel type, je ne sais pas, mais sans doute une position haute du thérapeute, comme un ascendant, une domination sur son sujet. Dans ce cas, comment assurer la qualité du lien, entre l'hypnologue et son client, comment favoriser l’équilibre des présences si précieux au changement ? Je ne sais jamais à la place de l'autre, je ne devine jamais la vérité de l'autre, je ne maîtrise aucune magie qui permettrait au client de s'appuyer sur mon prétendu pouvoir. Non, rien de tout cela. Je m'en remets à notre lien, notre présence l'un à l'autre pour que mon consultant entre simplement dans l'état d'hypnose. Et pour être tout à fait honnête, je crois que mon client est déjà en état d'hypnose avant de sonner à ma porte... (nous y reviendrons dans un autre post).

Allons un peu plus loin. Si je désignais mon client comme "non réceptif", alors je lui ferais porter la charge de l'échec de son évolution. Je ne suis pas opposé à cette idée, défendant le principe de responsabilisation du changement chez le consultant, mais je devrais m'assurer au préalable que "l'émission", celle qui serait non reçue, celle qui serait de mon fait, soit bien partie, de façon claire ! Quelle pourrait être la nature de cette émission ? Une intention ? Un fluide comme le prétendait Messmer ? Un savoir indiscutable, une science, une certitude ? Une confiance absolue dans la maîtrise de ma technique ? Un dogme ? Tout cela à la fois ? La notion de "non réceptivité" de l'un, me renvoie à la certitude de la qualité de "l'émission" de l'autre, or je considère toute certitude comme un danger mortifère au principe d'évolution, ce que je sais "vrai" n'a plus besoin d'être remis en question et de faire l'objet d'un changement. "Si ma vérité est la clé de ton changement, alors j'ai bien un pouvoir sur toi. Je suis omniscient et te contrains à faire tienne ma réalité". Violent, non ? Je sais que certains praticiens usent de ce principe, en imposant une forme d'autoritarisme, une impression intimidante, écrasant de vérités et de savoirs le consultant ou amplifiant alors sur leurs attentes fantasmées, craintes ou toutes autres formes de projection. Pourquoi pas, je trouve néanmoins le principe discutable, très brutal et bien trop superficiel dans la profondeur du changement. Bien entendu, j'accepte volontiers d'être qualifié de bisounours !

Ma seule préoccupation en séance est, non pas d'émettre pour que l'autre reçoive, mais assurer une présence totale, intense. Ma présence au consultant, rien ne compte davantage que celui ou celle qui est face à moi à l'heure de notre rencontre, ma présence à moi-même et notamment aux mots, métaphores, attitudes et images que je pourrais évoquer, la présence du client à lui-même, en explorant les ressentis et la corporalité : faire l'expérience du présent par la qualité de la présence, sans me préoccuper de je ne sais quelle réceptivité, qui me détournerait, je le crois, d'une possibilité de changement chez la personne qui pousse la porte de mon cabinet.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Autoritarisme et hypnose

Dans un précédent post, j'évoquais mon aversion de tout autoritarisme de la part de l'hypnologue. User de stratagèmes pour impressio...